Washington menace de freiner l’aide militaire à Tel-Aviv. Le président américain, Joe Biden, a averti, mercredi 8 mai, pour la première fois qu’il « ne livrerait pas » certaines armes à Israël, en particulier des « obus d’artillerie », en cas d’offensive majeure contre Rafah, située dans le sud de la bande de Gaza, près de la frontière égyptienne.

Il s’agit de l’avertissement le plus sévère des États-Unis, un proche allié d’Israël et son principal fournisseur d’armements depuis le début de la guerre entre l’État hébreu et le Hamas, le 7 octobre 2023. Une mise en garde qui intervient en pleine médiation au Caire, où les négociations indirectes ont repris pour tenter de parvenir à un compromis sur une trêve dans l’enclave palestinienne.

Avec 3 milliards de dollars annuels, les États-Unis sont le principal fournisseur de fonds et d’armes d’Israël, et avaient même expédié l’envoi de munitions au début de la guerre. Mais leurs relations sont aujourd’hui particulièrement agitées : Washington a déjà pris des mesures pour manifester son mécontentement à l’égard du premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, notamment en imposant des sanctions aux colons israéliens extrémistes.

Par le passé, Washington a fait pression sur Tel-Aviv sur un bon nombre de dossiers, sans réellement parvenir à peser sur les décisions israéliennes.

La crise de Suez en 1956

Les États-Unis reconnaissent l’État d’Israël le jour même de sa création, le 14 mai 1948. En 1956, en pleine crise de Suez, après la nationalisation du canal par le président égyptien Nasser, Israël attaque l’Égypte avec la France et le Royaume-Uni. Le président américain, Dwight Eisenhower, appelle à un retrait complet des troupes de la péninsule égyptienne du Sinaï, sous peine de sanctions. Tout comme les Français et les Britanniques, Israël finit par céder. C’est le tout premier avertissement adressé par Washington à Israël depuis le début de leurs relations diplomatiques.

Les deux États se rapprochent progressivement dans le contexte de la Guerre froide, tandis que Moscou intensifie, dès les années 1950, ses relations avec les pays arabes en guerre contre Israël. En 1962, les relations israélo-américaines sont qualifiées pour la première fois d’ « alliance » par le président John F. Kennedy.

Le projet nucléaire israélien

Dans les années 1960, Israël met en place un programme nucléaire avec le soutien de la France, malgré l’opposition de l’administration Kennedy, qui craint une prolifération. Washington redoute qu’Israël cherche à développer un programme nucléaire à but militaire.

Mais les demandes américaines de transparence ne font pas reculer Israël. Mis devant le fait accompli, les Américains modifient finalement leur stratégie. Deux ans après la guerre des Six-Jours de 1967, le président Richard Nixon et la première ministre Golda Meir passent un accord secret qui reconnaît à Israël le droit de posséder la bombe nucléaire, à condition de ne pas rendre publique l’information et de ne pas entreprendre d’essais. Depuis, Israël continue de préserver sa doctrine de l’ambiguïté.

Vers les accords d’Oslo

Désireux de stabiliser la région, les États-Unis interviennent dans le processus de paix au Proche-Orient après la guerre du Golfe, de 1990. En parallèle, ils acceptent d’octroyer des garanties bancaires pour un prêt de 10 milliards de dollars à Israël, afin d’aider à l’installation de juifs russes ayant quitté l’Union soviétique.

Le président George Bush père émet cependant une condition : il ne débloquera les fonds que si Tel-Aviv gèle la construction de nouvelles colonies en Cisjordanie et à Gaza, et participe à une conférence de paix avec les Palestiniens. Celle-ci, organisée en 1991, sera connue plus tard sous le nom de conférence de Madrid. Elle ouvre un processus de négociations qui favorisera les discussions de paix conduisant aux accords d’Oslo, de 1993.

Cette tentative de processus est rapidement mise en difficulté. En mars 2002, en pleine seconde Intifada, la résolution 1397 de l’ONU, rédigée par les États-Unis et votée par le Conseil de sécurité, préconise pour la première fois la mise en place de deux États israélien et palestinien indépendants.

De façon constante, les États-Unis considèrent les colonies israéliennes en Cisjordanie illégales au regard du droit international. Une position brièvement remise en cause sous Donald Trump. Mais l’administration Biden revient sur la ligne critique envers la colonisation en Cisjordanie. En février 2024, le président démocrate annonce même des sanctions financières à l’encontre de quatre colons israéliens accusés de violences anti-palestiniennes.